La beauté des laids se zappe sans délai
» Les jouisseurs n’ont pas besoin d’écrire. Poser une semblable question à un écrivain ! On écrit parce qu’on est malheureux. Votre monde dévore tout le reste. Vous êtes seul. Et soutenu par le style. Les poètes n’ont pas de vie intérieure. Les écrivains sont en général des bafouilleurs. »
L.F. Céline, Réponse à une enquête de Tel Quel, « Pensez-vous avoir un don d’écrivain ? », 1960.Présentation.
25 ans, environ 25 ans.
25 ans que la réalité m'a explosé à la tête : Je suis petit et moche.
As-tu déjà songé à la vie d'un mec petit et moche en France ? Tu as toujours un prof en 5eme, au collège, qui te "motive" en disant :
"Tu verras, si tu as un bon job, les femmes seront QUAND MÊME amoureuses de toi".
Il y a aussi les potes qui te suggèrent de devenir PD, "car, tu vois, les filles de toutes façons, elles ne s’intéressent pas à toi". Tes camarades te cachent maladroitement les "boums" organisées par les filles, de peur que tu réclames une invitation.
Puis tes propres parents qui ne s’inquiètent pas que tu sois TOUJOURS seul, sans copine. Situation normale pour eux, finalement.
Un jour, tu vois leurs yeux qui se ferment quand un voisin s’inquiète naïvement de la solitude de leur enfant ; "il a bien une petite copine, une petite amoureuse ?".
Et là, tu comprends ce que signifient les yeux fermés. Je hais mes parents.
Et surtout les filles, les filles qui te font comprendre à longueur de regards méprisants que tu ne vaux rien, que jamais tu ne pourras coucher avec elles. Les plus perverses te le disent en face, en y ajoutant un sourire de dédain, s'empressant de mettre leur bras sur l’épaule d'un connard.
Pourtant, tu fais tout pour leur plaire : tu es le meilleur élève au collège, tu es le meilleur sportif du lycée, tu joues de la musique, tu les fais rire, bref, tu es un excellent camarade.
Tout le monde te dit que ça va marcher AU FINAL. Et quand tu invites une demoiselle au café ou au restaurant, elle te bassine avec son boyfriend : "il est tellement grand et beau".
A 16 ans, tu comprends que ton unique rôle auprès des femmes sera celui de confident. Tu ne seras jamais considéré comme un amoureux potentiel et encore moins comme le prince charmant.
Les jeux sont faits.
Et toi, tu pleures secrètement toutes les nuits car tu sais que tu es foutu.Que ta vie est déjà foutue.
A la première fille à qui tu as proposé un simple baiser, elle t'a répondu par un fou rire qui t'a brisé le cœur pour des années.
Plus tard, après des années de branlettes imposées par ton statut de "célibataire malgré toi", tu te décides à coucher avec des prostitués. Tu les payes, tu les baises du mieux que tu peux, tu les fais même rire ... mais elles aussi, par inadvertance (et sans réfléchir aux dégâts), elles te parlent de leurs clients si beaux, si grands, si forts. Tu n’écoutes plus, tu les baises de plus en plus méchamment et tu continues à payer.
Puis tu comprends que même la société trouve normal que tu sois seul. Tu découvres que personne ne te propose de sortir et faire la fête, car "tu sais, t'es lourd avec les filles, tu les branches et ça les vexe". Tu es seulement accepté quand tu prends le rôle du bouffon, EXCLUSIVEMENT du bouffon. Tes potes se servent de toi pour "briser la glace" car tu as le physique du joker. Tu es un rigolo.
Les soirées et les discothèques sont des lieux infernaux pour ta sensibilité. Pour des raisons différentes, les hommes et les femmes t'en refoulent. Tu es un nabot qu'il faut bousculer pour les uns, tu es définitivement invisible pour les autres. A 20 ans, tu comprends que les discothèques ne sont pas des lieux prévus pour toi. Tu n'y as aucune chance. Définitivement.
Tu perds le sens de l'humour : c’était une voie sans issue.
Tes amis de gauche te parlent d’Égalité. Tes amis de droite de Liberté. Tu ne comprends rien à leurs concepts vaseux car TU ES SEUL.
Tu as 24 ans. 200 homosexuels ont déjà essayé de t'enculer. Aucune fille n'a accepté de t'embrasser.
Alors tu bosses à mort :
"ah bon, vous travaillez même le dimanche ? vous êtes courageux !" te disent les cons.
Tu essaies d'oublier toutes ces frustrations dans ton boulot, tu deviens riche.
Tu te tapes des putes, puis des call-girls, puis des escorts.
Tu voyages dans tous les pays où les filles sont faciles. tu payes.
Mais, même avec la dernière des putes asiatiques, c'est uniquement parce que tu peux claquer 500 euros par jour qu'on reste avec toi.
Et il subsiste toujours ce regard haineux, au petit matin, quand tu fais face à ta fausse "conquête" : ce regard terrible qui te fait comprendre que, décidément, non, tu n'as pas le droit d’être amoureux ou d’être aimé. Es-tu seulement humain ?
Et puis vient la quarantaine, tu fréquentes des européennes (avec ou sans gamin), qui se sont bien éclatées dans leur jeunesse, puis se sont faites jeter à la ménopause par leur connard de mari/copain.
Elles te racontent leurs histoires d’hystériques. Il y en a même certaines que tu as connu à 20 ans et qui te font croire que leur vie d'alors était horrible. Mais putain, tu te souviens très bien de leur vie de rêve d'alors ! Et maintenant elles veulent te faire croire du contraire ?!? Putain !
Savent-elles ce qu'est l'horreur de ne jamais appelé au téléphone ? De ne jamais se faire souhaiter son anniversaire ? De dormir seul tous les soirs ? D'être uniquement appelé quand on a besoin de tes services ou ton argent ? L'horreur de ne pas être aimé ? Le savent-elles ces connes ?
Mais non, elles n’écoutent pas ta détresse. Rien ne les arrête et elles ne prennent pas de gants avec toi, même à 40 ans :
"finalement, un mec moche, c'est plus rassurant. Toi, t'es sympa, pas comme les beaux garçons".
Elles insistent car il est important qu'elles ne finissent pas leur vie seule :
"tu comprends, au cas où un problème arriverait, je pourrais compter sur toi et ton argent".
Tu leur dis que ça te vexe qu'elles disent ça : elles s'offusquent de ta rébellion.
Et elles te disent, le regard assassin :
"Mais pour qui te prends-tu ?".
Ta révolte orgueilleuse, tardive, légitime, est elle aussi vouée à l’échec.
De toutes façons, ne te fais pas d'illusions, ces vieilles femmes rêvent de retourner vivre avec leur ex-mari et vont te jeter à la première occasion, comme un laideron que tu es.
Sois le bienvenu dans mon monde merveilleux